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    Intérieur. Jour.

    « Intérieur. Jour. Une femme se tient assise dans un large fauteuil. Elle porte des vêtements légers et regarde en direction de la fenêtre. Plus tard, peut-être, elle se lèvera pour aller voir ce qui se passe à l’extérieur. Elle a un peu froid et va s’asseoir sur le bord d’un lit trop grand pour elle. C’est l’hiver. Plus tard encore, dans un autre fauteuil, elle croit entendre un bruit lointain. La vieille télévision derrière elle ne fonctionne plus. Quelques vieux magazines sont posés sur une table basse. Elle en choisira sans doute un dans quelques instants, tentée par la couverture. Elle aurait bien envie elle aussi de susciter le désir, comme cette belle femme qui arbore des formes généreuses. Elle se ravisera pourtant, préférant revenir à la fenêtre. Elle lira plus tard. »

    J’ai réalisé cette série de photographies à « Bataville » (Moselle), dans un des bâtiments désaffectés de l’usine qui fabriquait les chaussures Bata, aujourd’hui racheté par un couple de particuliers. C’est en tournant un docufiction (production en cours) en tant que cadreuse que j’ai découvert cet espace presque irréel, comme surgi du passé et que j’ai eu l’envie d’y réaliser ce travail, avec la propriétaire du lieu comme modèle.
    Dans ce bâtiment réaménagé avec du mobilier d’époque, j’ai mis en scène une femme dont l’absence entre en résonance avec la vacuité du décor et le vide qu’elle essaie de combler, en une multiplication de poses figées. Disposées par deux ou par trois, ces suites a-narratives se « déplient » et révèlent un corps en attente, décliné comme les différentes facettes d’un même prisme.
    Cette série ne raconte pas. Elle fantasme les possibilités d’un récit. L’espace dans lequel évolue cette femme paraît fictif, imaginaire et son corps fragile semble pouvoir disparaître à tout instant. Comme si cet « espace à vivre » lui était étranger et appartenait déjà au domaine du souvenir. Face à elle(s), le spectateur se retrouve dans une étrange sécurité, à la fois confortable et angoissante, dans cet entre deux monde que représente le non choix. Tel des images suspendues, j’enferme mes personnages dans un présent qui dure, un « présent perpétuel ».

     

     

     
     
     
     
     

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